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  • Photo du rédacteurjackiebhamilton

Pardonner veut-il dire que le mal qui a été fait n'est pas réel



Je suis en train de vivre une drôle de situation. J’ai développé, au cours des dernières années, une anxiété au volant que j’ai essayée de comprendre et de traiter de toutes les façons inimaginables. Je vous rassure ici; pas d’accident grave en cause, mais d’autres circonstances tout aussi aliénantes. (C’est une autre histoire que je vous raconterai un jour...)


Ceci dit, ma dernière tentative pour me débarrasser de cette crainte « non fondée » qui rend ma vie plutôt compliquée a été d’aller en IMO (intégration par les mouvements oculaires), un traitement sensé être efficace contre les traumatismes.


La thérapeute m’avait assurée qu’en quelques séances, tout serait guéri. « En X années de pratique, je ne connais personne pour qui ça n’a pas fonctionné », m’a-t-elle dit.


Mais elle était loin de s’imaginer qu’on était en train d’ouvrir une boîte qui en contient une autre, puis une autre… Un peu comme des poupées russes, finalement.


En résumé, on est parti d’une anxiété au volant et me voilà désormais rendue à déterrer des souvenirs d’enfance, ô combien douloureux et complexes; souvenirs que j’avais réussi à classer et, surtout, à transcender. C’est du moins la perception que j’en avais.


Pour vrai, j’ai travaillé très fort dans ma vie pour me « dissocier » de mon enfance malheureuse et me faire une vie à la hauteur de mes aspirations, mais, apparemment, que l’IMO a fait remonter tout ceci à la surface, tant et si bien que, depuis mes deux dernières séances, je me sens physiquement et mentalement redevenue celle que j’étais avant et ça me fait littéralement capoter.


Du coup, je suis perplexe... Mais, en même temps, je suis aussi du style à clamer haut et fort que rien n’arrive pour rien dans la vie. Ainsi, est-il possible que je doive passer par ce chemin qui ne semble pas du tout avoir de lien avec la crainte de la conduite automobile pour découvrir des causes sous-jacentes à ma problématique? Je reste ouverte à l’idée puisque je sais à quel point l’esprit humain sait se montrer fort complexe.


Tout ceci pour vous dire que, depuis ces dernières séances d’IMO où je sens avoir fait un retour dans le temps au niveau de mon ressenti physique et mental, je me suis mise à refaire des cauchemars la nuit. Donc, ça brasse en-dedans!


Cela m’amène au véritable sujet de ce billet qui est le pardon. Comme il n’y a pas de coïncidence dans la vie (pas dans la mienne, du moins), il s’avère qu’il y a un certain temps, je me suis procurée un livre qui parle de l’impact de notre histoire familiale, mais aussi de l’histoire de toute la lignée (notre mère, père, leurs parents, etc.).


Et il s’avère également que c’est maintenant que j’ai envie de le lire et, sincèrement, je trouve que le livre a été écrit pour moi. Pour moi, dans le moment...


Déjà, l’histoire de l’auteur, à sa naissance, est quasi un copié-collé de la mienne. C’est d’ailleurs probablement ce qui fait que j’ai envie de poursuivre la lecture du livre.


Hier, on me proposait un exercice qui était de visualiser ma mère (qui est décédée, en passant). De la voir à quelques mètres de moi et d’exprimer ce que je ressentais.


J’ai été surprise de constater une forte crispation, si ce n’est une répulsion à l’idée de la sentir si proche et c’est là que j’ai réalisé que, finalement, je n’étais pas en paix avec cette femme qui m’a mise au monde.


Je ne pouvais pas l’être si mon corps, en sa présence, éprouvait ce qu’il éprouvait. Comment cela était-il possible?


Puis, l’exercice suivant consistait à me rappeler de tout ce qui, dans sa vie à elle, avait pu la faire souffrir et, là, je peux vous dire que la liste était longue.


Au cours de cet exercice « de me mettre dans ses souliers », j’ai senti que mon corps relâchait et que la méfiance voulait faire place à la compassion.


Je me suis même surprise à imaginer ma mère à 27 ans et moi au même âge qu’elle… en me voyant jaser avec elle, comme deux amies.


Cela m’a émue et, du coup, rapprochée de cette femme que j’ai toujours perçue et sentie incroyablement froide et indifférente.


Cette visualisation m’a aussi fait comprendre que j’ai hérité de certains de ses traits de personnalité qui, parfois, refont surface et me déstabilisent. Sa dureté et son intransigeance, par exemple.


Il faut dire qu’elle a dû en faire des deuils, ma mère, dans sa vie. À commencer par la carrière de comédienne qu’elle rêvait d'avoir, de son déménagement à Montréal qu’elle a abandonné pour rester coincée dans un petit village où elle ne pourrait jamais réaliser un autre de ses désirs : voyager.


Puis, le véritable amour de sa vie sur lequel elle a dû faire une croix – je n’ai jamais vraiment su pourquoi – alors qu’elle convolait en justes noces avec mon père à l'âge de 27 ans. Probablement pour éviter de se faire traiter de "vieille fille"...


Puis, j’ai repensé à ses sœurs qui ont été emportées par la maladie. À ses deux fausses couches alors qu’un des bébés avait 6 mois.


À sa condition cardiaque difficile qui a nécessité deux opérations chirurgicales importantes.


À tous ces valiums qu'elle prenait parce qu'elle disait que son coeur s'emportait, justement.


Ensuite, j’ai revu à quel point elle devait travailler fort à chaque jour pour aider mon père à mettre du pain sur la table, et ce, en transformant notre maison déjà si modeste et petite en foyer d’accueil.


Tous ces enfants qu’elle a accueillis à bras ouverts alors que ces mêmes bras sont toujours restés fermés pour moi. Des cas difficiles : retards mentaux, trisomie 21, adolescents en crise…


Et là, je me suis dit : « Comment puis-je ne pas pardonner à cette personne qui, somme toute, a vécu une vie extrêmement éprouvante et décevante? »


Et la réponse qui m’est venue est : « Parce que si je lui pardonne, c’est comme si tout ce que j’avais vécu ne devenait plus réel… »


Toute ma peine, mon désespoir. Toutes ces nuits où je pleurais à chaudes larmes en priant Dieu pour que mes vrais parents viennent me chercher (parce que j’étais convaincue que j’avais été abandonnée dans un panier sur le bord de la route).


Toute l’insécurité et la solitude qu’on peut ressentir lorsqu’on est un enfant et qu’on n’a personne vers qui se tourner pour raconter sa détresse.


Toutes ces nuits sans dormir. Ces cauchemars à répétition.


Toute cette honte de vivre, ce sentiment de ne pas mériter d’être au monde.


« Tout cela, maman, ne sera plus considéré si j’ose te pardonner pour vrai. Et ça me fait mal pour toi, mais ça me fait mal pour moi aussi.
Car cette enfant que tu n’as pas su prendre dans tes bras et aimer, moi, je veux l’étreindre très fort et lui dire à quel point elle a de la valeur désormais.
D’attendre après ton amour qui n’est jamais venu a été une grande souffrance pour moi et c’est pourquoi, pour ma survie, un jour, j’ai décidé que tu n’existais plus.
Certes, tu fais encore partie de mon histoire familiale, mais tous les liens émotionnels sont désormais coupés.
C’était une question de survie à l'époque ou, plutôt, un choix de vie.
Alors, je ne sais pas si je vais faire le grand saut et arriver à te pardonner complètement, mais je veux bien essayer.
Tout cela, en essayant de ne pas banaliser ce que tu m’as fait vivre car ce que tu m’as fait vivre a existé POUR VRAI. »
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